Critique Un conte de Noël

Mise en scène Julie Deliquet

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Julie Deliquet interroge, à nouveau, les liens entre cinéma et théâtre en adaptant Un conte de Noël, réalisé par Arnaud Desplechin en 2008, et offre aux comédiens une partition envoûtante.

Il était une fois, une réussite

Et une famille. Une famille prisonnière de ses non-dits et de ses démons intérieurs. La mort du premier enfant rode encore. Atteint d’une maladie infantile, le petit Joseph, âgé de six ans, n’a pu être sauvé. Pas même, par son frère Henri, conçu dans l’urgence de cet espoir. Depuis, rancoeur et jalousie règnent.   

Le spectacle s’ouvre sur la voix de l’enfant disparu. C’est lui qui, en voix off, présente ses parents. Sa photographie trône, surplombant les êtres et les choses. C’est bien sous sa présence fantomatique que les événements auront lieu. A l’occasion d’un noël, la famille se retrouve. Il s’agit de faire corps autour de la mère malade qui attend, à son tour, un donneur compatible pour une greffe. Qui pourra la sauver ? Qui pourra donner une fin heureuse à ce conte de Noël ? L’ironie du sort veut que ce soit le fils banni et honni qui en soit capable. Comme dans une tragédie shakespearienne, les sentiments s’exacerbent à la faveur de ces cartes rebattues. 

Un Conte de Noël
Ouverture sur le décor @mlascene

Dans l’oeil du théâtre

Le dispositif scénique, bi-frontal, choisi par Julie Deliquet et Zoé Pautet plonge le spectateur au coeur des déchirements de cette famille. Enfermée dans son enfer, la famille l’est aussi par le public qui l’observe de chaque côté. Il semble qu’il n’y ait plus d’échappée possible pour les personnages. Le plateau devient le lieu où tout doit se régler, dans les larmes, les cris et l’exaspération des sentiments enfouis.

Les acteurs arpentent ce champ de l’intériorité sans qu’aucun regard ne puisse les quitter. Avec énergie et fluidité, chacun des comédiens s’empare de son personnage pour jouer la partition envoûtante dirigée par Julie Deliquet. Baignée par les très belles lumières de Vyara Stefanova, la scène s’amuse à renouer avec l’esthétique baroque dans le dernier « acte ». Miroir tendu par le théâtre sur le drame familial qui se joue devant nos yeux sur le plateau. Meurtres, ignominie, dévoration, les membres de la famille les interprètent dans une petite pièce dans la pièce. Provoquant une catharsis salutaire, par l’excès et le rire. 

Pas de fin heureuse dans Un conte de Noël, mis en scène par Julie Deliquet. Juste du désenchantement pour les personnages, et le sentiment d’avoir vécu un moment de réelle intensité dramatique pour le spectateur. ♥♥♥♥♡


Un Conte de Noël d’Arnaud Desplechin

mise en scène Julie Deliquet  Collectif In Vitro

version scénique Julie DeliquetAgathe Peyrard et Julie André
scénographie Julie Deliquet et Zoé Pautet
lumières Vyara Stefanova
costumes Julie Scobeltzine

avec
Julie André, Stephen Butel, Éric Charon, Solène Cizeron, Olivier Faliez, Jean-Christophe Laurier, Marie-Christine Orry, Agnès Ramy, Thomas Rortais, David Seigneur, Hélène Viviès, Jean-Marie Winling

Odéon-Théâtre de l’Europe Berthier 17e jusqu’au 2 février


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