Iphigénie à Splott mise en scène par Blandine Pélissier à L’Artéphile restitue les accents profondément humains de l’écriture de Gary Owen. Comment une jeune galloise, immature et paumée, dans un quartier à la dérive de Cardiff va-t-elle être amenée à se sacrifier en toute conscience pour le bien de la communauté ? Où il est question d’alcool, d’amour, d’énergie et de transcendance.
Critique par M La Scène du spectacle Iphigénie à Splott
D’une Iphigénie à l’autre
Figure mythique de la littérature et des arts, Iphigénie est associée depuis l’Antiquité à l’idée de sacrifice. Les Grecs, aux portes de Troie, victimes de vents contraires, exigeaient qu’Agamemnon mène sa fille à l’autel pour apaiser les dieux. A Splott, un quartier du sud de Cardiff, frappé par le chômage et la misère, Efflie a subi un terrible préjudice. Mais, cette Iphigénie moderne, refuse de rester prisonnière d’un destin écrit par d’autres. C’est avec une lucidité assassine qu’elle immole l’indemnisation qu’elle est en droit de recevoir pour le bien de la communauté.
Sous l’écriture de Gary Owens ( manuscrit traduit en français par Blandine Pélissier et Kelly Rivière -dont M La Scène avait adoré An Irish Story-), Efflie décide ne n’être plus victime. La jeune fille combative, bravache et insolente choisit en toute conscience de s’oublier. D’oublier la violence qui lui a été faite, qui l’a meurtrie au plus profond de sa chair et de son âme. D’oublier sa vengeance, pour que les autres, les plus démunis, ses compagnons de misère, ne soient pas encore plus coupés des aides sociales.
« Quand vous me voyez bourrée dès le matin là, à zoner. Vous vous dites –
Pauv’ pouffiasse. Sale traînée.
Mais savez quoi ? Ce soir
Vous êtes tous là pour me rendre grâce
À moi.
Ouais, j’sais, ça pique
Mais vous là, chacun d’entre vous
Vous me devez quelque chose.
Et ce soir – les mecs et les meufs, mesdames et messieurs –
Je suis venue pour ramasser. «
Pour incarner Effie, Blandine Pélissier a fait appel à Morgane Peters. Seule en scène, la jeune comédienne donne corps à la langue âpre et féroce du personnage. Sur un plateau volontairement minimaliste, l’accent est mis sur l’énergie, la force lumineuse de cette « laissée-sur-le-carreau », qui empoigne son destin pour le transcender.
A voir à L’Artéphile, à 21h40
Festival OFF d’Avignon 2019
Texte : Gary OWEN / Mise en scène : Blandine PÉLISSIER / Interprétation : Morgane PETERS / Lumières : Ivan MATHIS / Son :Loki HARFAGR / Collaboration artistique, scénographie, costumes, graphisme : SO BEAU-BLACHE /
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