Augustin Mal n’est pas un assassin
Mise en scène Olivier Lopez
Au Théâtre des Halles-Hors les murs, Conservatoire du Grand Avignon, Augustin Mal n’est pas un assassin, mis en scène par Olivier Lopez, met en lumière la face ordinaire et effrayante du mal. François Bureloup y excelle.
Interviews vidéo d’Olivier Lopez et de François Bureloup, après la représentation, réalisées par M La Scène
La Face ordinaire du mal
Augustin porte bien son nom. Ordinaire et redoutable. Programmatique. Comme son patronyme, l’homme est à la fois banal et dangereux. Lisse, au point qu’il semble invisible aux autres et effrayant, lorsqu’on prête attention à ses paroles. Olivier Lopez, le metteur en scène, le définit comme un être de paradoxes. « C’est un loup. C’est ainsi qu’il se définit. et en même temps, c’est le premier des imbéciles » .
En créant ce personnage, Julie Douard, l’autrice, questionne le mal. « On en parle beaucoup en ce moment, poursuit Olivier Lopez, de ces hommes qui font le mal, de ces hommes qui sont dans une vision très patriarcale, très misogyne de la société. Lui, a été éduqué dans cette vision-là de la société et, en même temps, il est la première des victimes de cette société. Le premier à en souffrir et en même temps, le premier à faire mal. » Le texte offre une plongée saisissante dans l’intimité tranquille d’un homme monstrueux qui semble n’avoir aucune conscience de l’être. Bien éduqué, propre sur lui, ne s’énervant jamais, Augustin Mal le dit » Je ne crois pas qu’un seul mauvais sentiment m’habite hormis quelques rêves liés au sexe. » De cette frustration, naîtra le pire.
Dans sa précédente création, Rabudôru, poupée d’amour, Olivier Lopez proposait une réflexion pleine d’humanité sur la quête du profit. A travers le phénomène des « love-dolls » , de nombreuses thématiques étaient abordées, éthique, marchandisation du corps de la femme, luttes sociales et fin de vie. Avec Augustin Mal n’est pas un assassin, le metteur en scène choisit d’interroger la complexité d’un esprit malade, celle d’un prédateur ordinaire, que rien ne semble pouvoir arrêter.
Le juste interprète
Pour incarner le personnage paradoxal et trouble, d’Augustin Mal, Olivier Lopez, en concertation avec l’autrice, a choisi François Bureloup. « On l’a amené très loin de ce qu’il avait l’habitude de faire. C’était un défi » , commente le metteur en scène. Défi relevé à cent pour cent.
François Bureloup apporte toute sa bonhommie au monstre, si banal, qu’il en est effrayant. Le comédien EST Augustin Mal. Sans aucun jugement. Ainsi le décrit-il : « Augustin mal est un homme qui collectionne les slips et les déconvenues. Pour résumer sa philosophie, il ne veut pas faire du mal, il veut juste se faire du bien. C’est un peu un voisin, un peu un employé de bureau, un peu un oncle, un être ordinaire, et en même temps, on sent qu’il est dans une détresse, une souffrance affective. » François Bureloup rend palpable la complexité qui traverse le personnage.
L’acteur fait siens les mots du personnage. Il en assume la stupidité et la froideur cruelle. Les rires fusent mais souvent pour se protéger de l’effroi. A l’issue de la deuxième représentation, le comédien pouvait dire : « J’ai l’impression d’avoir les spectateurs dans ma main, dans la main d’Augustin » . Par son interprétation limpide, nous accédons aux méandres d’un esprit malade qui s’exprime avec une candeur terrifiante.
Seul en scène, François Bureloup, dans Augustin n’est pas un assassin, parvient à composer un personnage d’autant plus glaçant qu’il nous est apparu, un temps, vulnérable et sympathique.
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Augustin Mal n’est pas un assassin
HALLES (THÉÂTRE DES)
du 7 au 26 juillet – Relâches : 13, 20 juillet
à 14h30
Auteur : Julie Douard
Mise en scène : Olivier Lopez
- Interprète(s) : François Bureloup
- Lumière : Louis Sady
- Régie : Loïc Manfredo
- Costumes : Laëtitia Guiral
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La Cité Théâtre
- Augustin Mal n’est pas un assassin, Julie Douard, éditions P.O.L 2020
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