Une alliance historique

entre trois géants européens des arts vivants

© @ Caio Liěrio
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Ils n’avaient jamais uni leurs forces. Soixante-dix-neuf ans après leur création, le Edinburgh International Festival, le Festival d’Avignon et le Holland Festival lancent leur première coproduction. Un geste rare. Un signal fort. Et le point de départ d’un partenariat qui préfigure la célébration commune de leur 80e anniversaire en 2027.

Trois festivals prestigieux : une première coproduction

La collaboration s’ouvre avec Un procès – après l’ennemi du peuple mis en scène par Christiane Jatahy. Une relecture incisive d’Ibsen, transformée en drame judiciaire où le public devient jury. Wagner Moura, révélé au grand public par Narcos, y tient le rôle principal. L’œuvre, portée par une équipe artistique brésilienne, interroge les fractures politiques et écologiques qui déstabilisent les sociétés contemporaines.

Première étape d’un voyage commun, le spectacle sera présenté successivement au Holland Festival (25–28 juin 2026), au Festival d’Avignon (juillet 2026) puis au Edinburgh International Festival (7–10 août 2026).

Un héritage né des ruines de la guerre

Les trois festivals partagent une même origine. En 1947, l’Europe sort exsangue de la Seconde Guerre mondiale. Les fondateurs imaginent alors l’art comme outil de reconstruction morale. Rudolf Bing à Édimbourg. Henk Reinink à Amsterdam. Jean Vilar à Avignon. Tous défendent la culture comme langage commun et espace de dialogue.

Depuis, chaque festival développe sa propre identité. Édimbourg impose un modèle international d’excellence artistique. Amsterdam devient une scène majeure de l’innovation scénique. Avignon transforme la ville en forum vivant où le théâtre s’adresse à tous. Malgré leurs singularités, un même fil conducteur demeure : créer des ponts là où les frontières se dressent.

Un projet artistique tourné vers l’avenir

Avec Un procès – après l’ennemi du peuple, Christiane Jatahy renoue avec les scènes qui ont accompagné son parcours. Elle reprend Ibsen pour analyser la crise démocratique et la polarisation. Elle réaffirme aussi le rôle du théâtre comme lieu de débat. Sa démarche, saluée internationalement, s’inscrit dans la continuité de ses créations récentes, de After the Silence au Edinburgh International Festival aux spectacles présentés au Holland Festival, dont elle a été artiste associée en 2024, et au Festival d’Avignon ( Le Passé qui déborde) ( Entre chien et loup).

Les directeurs des trois institutions soulignent l’importance de cette alliance. Pour Roy Luxford, directeur créatif du Edinburgh International Festival, il s’agit d’un retour à l’esprit fondateur : rassembler les peuples après les déchirements. Tiago Rodrigues, directeur du Festival d’Avignon indique que l’enjeu est de défendre la liberté artistique. Pour Emily Ansenk, directrice du Holland Festival, la coopération est un acte nécessaire face à la montée des intolérances.

Vers un 80e anniversaire commun

Ce partenariat marque une étape décisive dans l’histoire des festivals européens. En 2026, l’union des trois institutions ouvrira la voie à une célébration inédite. L’objectif est clair : amplifier les voix des artistes, élargir les publics, et affirmer la place essentielle des arts du spectacle dans un monde en quête de repères.

À l’heure où les tensions s’accentuent et où les récits s’affrontent, cette coopération rappelle une idée simple. L’art éclaire, relie et parfois, répare.