L’Occupation
Mise en scène Pierre Pradinas
Au Théâtre des Halles, Romane Bohringer s’empare avec un naturel désarmant du texte L’Occupation, d’Annie Erneaux. La comédienne occupe le plateau de sa présence lumineuse.
Occupante jalousie
Le court roman auto-fictionnel d’Annie Erneaux, L’Occupation, paru en 2002, place la jalousie au cœur du récit. Après six ans de relation avec W, son amant, la narratrice le quitte. « Autant par lassitude que par incapacité à échanger ma liberté (…) pour une vie commune qu’il désirait ardemment depuis le début » , écrit-elle.
A l’origine de la rupture, l’écrivaine va néanmoins basculer dans la jalousie la plus obsessionnelle. Une seule phrase suffit : « Il m’a appelée un soir, il m’annonçait qu’il déménageait de son studio, il allait vivre avec une femme » . Dés lors, comme un poison acide et virulent, la jalousie va gangréner son esprit et son corps. L’autre, la femme dont elle ne sait rien, devient l’objet envahissant de son désir. Connaître son nom, son adresse, son âge, son métier, nourrit une quête de chaque instant. « Cette femme emplissait ma tête, ma poitrine et mon ventre. Elle m’accompagnait partout, me dictait mes émotions. Elle provoquait des mouvements intérieurs que je n’avais jamais connus. J’étais, au double sens du terme, occupée. »
De cette occupation naît la folie, mais aussi l’énergie. A travers ce sentiment obsédant, la narratrice découvre en elle, de formidables ressources d’invention que l’écriture va magnifier.
Romane Bohringer, lumineuse
Sur scène, Romane Bohringer s’empare avec un naturel désarmant des mots d’Annie Erneaux. La comédienne occupe le plateau de sa présence lumineuse. Tour à tour, facétieuse, ironique, violente, enfantine ou paillarde, elle conquiert les cœurs. Elle arpente la scène avec énergie, tout en laissant sa sensibilité occuper le territoire de l’intime.
La mise en scène fluide de l’Occupation par Pierre Pradinas autorise une grande liberté de jeu. Aux côtés de la comédienne se tient Christophe « Disco » Minck. En direct, il accompagne à la harpe, au synthétiseur et au piano arrangé, la quête nourrie d’imaginaire du personnage. La musique, comme les vidéos de Simon Pradinas, projetées sur un large écran en fond de scène, construisent, en échos, l’espace mental de la narratrice de l’Occupation.
Voir jouer Romane Bohringer est un vrai bonheur. Son jeu déborde de sincérité. Le public ne s’y trompe pas.
Les LM de M La Scène : LMMMMM
L’Occupation
du 7 au 30 juillet – Relâches : 13, 20, 27 juillet
à 14h00
Auteur Annie Erneaux
Mise en scène : Pierre Pradinas
- Interprète(s) : Romane Bohringer, Christophe »Disco » Minck
- Scèno-Lumières : Orazio Trotta
- Son : Olivier Hoste
- Scèno-Vidéo : Simon Pradinas
- Musique originale : « Disco
- Festival Off Avignon
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