Omar Porras adapte Amour et Psyché de Molière et fait sa déclaration au théâtre. Un régal !
Le mythe d’Amour et Psyché a traversé les âges. Les Métamorphoses d’Apulée au II e siècle après J.C en ont fixé l’histoire. La beauté de Psyché provoque la jalousie de Vénus. La déesse se venge. Celle-ci ordonne à Cupidon, son fils, de rendre Psyché amoureuse du plus laid des hommes. Mais, Cupidon s’éprend de la belle mortelle. Pour protéger cet amour interdit, Psyché, emportée par Zéphyr dans un palais merveilleux, ne devra pas chercher à connaître l’identité de son mystérieux époux. On sait ce qu’il advient des interdits !
L’adaptation d’Omar Porras met en scène des scènes phares de la tragi-comédie ballet de Molière, que celui-ci écrivit en collaboration avec Corneille et Quinault, mais s’appuie également sur les versions narratives antiques et classiques du mythe. Le but est avant tout d’en restituer la puissance magique. Le parti-pris est joyeux, inventif et célèbre la liberté d’un théâtre qui aurait abandonné tout complexe.
Les tréteaux de l’imaginaire
La scénographie de Fredy Porras, comme la mise en scène, revendiquent cette célébration espiègle. Masques, voiles, scène sur la scène, fumée, machinerie à vue, effets pyrotechniques volontairement déficients, la théâtralité s’affirme avec facétie. Un projecteur claque. Deux comédiens, une lampe torche à la main, s’excusent du contretemps et proposent, le temps de la réparation, de jouer ce qui devait être représenté. L’échange avec les spectateurs fait rire les enfants. Et les autres.
Costumes, maquillages, décor, lumière, ont été pensés pour nourrir le « délire onirique » voulu par le metteur en scène. La gestuelle des acteurs également. Philippe Gouin incarne à la fois une des sœurs de Psyché et « Amour ». Fardé, le comédien exacerbe les ridicules de odieuse sournoise. Le couple qu’il forme avec Jonathan Diggelmann ( l’autre sœur) provoque l’hilarité. Mais, lorsqu’il se glisse dans la peau du dieu Amour , Philippe Gouin évolue avec grâce et élégance. Se dessine alors en creux, la figure éblouissante du roi dansant.
Amour et Psyché renoue avec le merveilleux de la fable, avec la fougue des tréteaux, avec l’outrancier du baroque et la préciosité du classicisme. Véritable déclaration, Omar Porras y réaffirme le pouvoir magique du théâtre.
A voir jusqu’au 18 avril 2019 au Théâtre 71.
D’après Molière | mise en scène Omar Porras | adaptation Marco Sabbatini en collaboration avec Omar Porras et Odile Cornuz.
Avignon 2019 : au 11. Gilgamesh Belleville, Omar Porras interprétera « Ma Colombine », le solo que lui a écrit Fabrice Melquiot.