L M Anna Karénine mise en scène Laetitia Gonzalbes
Anna Karénine, mise en scène par Laetitia Gonzalbes, au Théâtre de la Contrescarpe, propose une relecture décapante du roman de Tolstoï. Anna n’est plus séduite par un homme mais par une femme.
L’amour à mort
L’héroïne de Tolstoï, Anna Karénine, à la beauté singulière et au destin tragique n’a cessé d’être interrogée à travers de multiples adaptations. Comme si sa figure transgressive échappait à toute interprétation arrêtée et convenue.
Inspiré à l’écrivain russe par un fait divers, le suicide d’une jeune femme abandonnée par son amant, dont le corps est déchiqueté par un train, le récit narre, entre autres, l’histoire d’un adultère. Celui d’Anna Karénine. Issue de la haute société de Saint-Pétersbourg, Anna est mariée à un un haut fonctionnaire de l’administration impériale, à la « rigidité cadavérique ». A la recherche d’un amour véritable, elle tombe dans les bras de Vronski, un mondain charismatique. Mais, un « funeste présage » a marqué leur rencontre, la mort d’un ouvrier coupé par un train. Evénement programmatique de la fin sanglante d’Anna. Étrangement, Tolstoï mourra lui aussi, en 1910, dans une gare.
L’amant est une femme
Laetitia Gonzalbes choisit d’interroger notre regard sur Anna Karénine en modifiant le sexe de l’amant. Vronski devient Varinka. L’inspiration d’Anna à l’amour vrai, à la jouissance, sera comblée par le désir que lui porte une autre femme. C’est Varinka ( Maroussia Henrich) qui offre à Anna ( Lise Laffont) la possibilité d’échapper à l’univers mortifère de son mari.
Sur scène, la sensualité passe par la danse. Les gestes, chorégraphiés, traduisent l’approche des corps, l’accord des sens et la volupté de l’entente charnelle. Le couple vivra son amour condamné par la société jusqu’au déchirement et au drame final.
Quatre interprètes soutiennent les choix de la metteure en scène. On retiendra la prestation de Lise Laffont. Elle est l’innocente jeune épousée, la femme qui affronte son mari, la mère dépouillée de son enfant, l’amante écorchée. Face à elle, Maroussia Henrich, dresse le portrait d’une femme forte qui accompagne jusqu’au bout celle qu’elle aime. David Olivier Fisher est parfait en mari falot. Samuel Debure, masqué, à la diction sans faille, incarne « L’homme sans nom », une figure du destin ironique et grave.
Sur le petit plateau du Théâtre de la Contrescarpe, Laetitia Gonzalbes parvient à faire exister l’héroïne de Tolstoï, tout en imposant une vision audacieuse et actuelle. A voir.
Auteur : Adaptation libre de Laetitia Gonzalbes d’après le roman de Léon Tolstoï, Bel-Ami et Enragée ? de Guy de Maupassant, poèmes et partitions de Jean Fournée.
Distribution : Lise Laffont, Maroussia Henrich, David Olivier Fischer, Samuel Debure
Mise en scène : Laetitia Gonzalbes
Lumières : Charly Hove
Musique : Tim Aknine et David Enfrein
Costumes : Claire Avias