Critique Une pièce sous influence

Mise en scène Sophie Lebrun et Martin Legros

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Une pièce sous influence
© Virginie Meigné

Une pièce sous influence, du collectif La Cohue, met en scène quatre personnages. Parmi eux, une femme qui refuse de vendre sa maison et d’abandonner la chambre de sa fille décédée, seul lieu tangible où son odeur flotte encore. Si la pièce cultive avec succès le loufoque, les dernières scènes bouleversent. Nombre de spectateurs ne pouvaient retenir leurs larmes. Une écriture totalement maîtrisée.

Le prix du deuil

Vendre la maison, semble être acquis. Pourtant, Anna et Mathias, très vite, livrent des dissensions souterraines. Lui, n’est plus capable d’y vivre. Elle ne peut se résoudre à quitter ce lieu par trop chargé de souvenirs. Dans un premier temps, si son mari a réussi à lui arracher son accord, c’est qu’Anna sort d’une grave dépression. On la sent sur le fil, prête à replonger au moindre faux pas. Depuis le décès de leur fille, morte dans un accident de voiture, sa raison vacille. Cette ancienne pianiste n’est plus capable de jouer et de s’approcher de l’instrument qui faisait sa joie. La veille de la signature chez le notaire, Anna invite à boire un verre, chez elle, les futurs propriétaires, qu’elle a rencontrés fortuitement lors du carnaval qui battait son plein dans la ville voisine.

Le spectacle s’ouvre sur un plateau couvert en grande partie de confettis. La structure de la maison semble réduite à l’os. De l’unique fenêtre, ne reste que l’encadrement. Partant du sol, de fins câbles tendus évoquent les fils électriques qui courent à l’extérieur comme les fils qui retiennent encore Anna à la maison. Des oiseaux empaillés sont accrochés à d’autres filins. L’unique meuble fort du décor est un piano, remisé légèrement à l’arrière. A l’exception de ces quelques éléments, la pièce est vide de meubles. Une poubelle traîne. Rien ne permet de s’asseoir, ni de recevoir des invités. La scénographie (Antoine Giard) induit un sentiment de malaise. En creux, la maison semble pleine de la joie passée et de la petite fille disparue.

Le rire au coin des larmes

C’est dans ce décor malmené qu’entrent deux personnages loufoques (Sophie Lebrun et Martin Legros). L’une, porte un longue robe tachée de sang, une fausse hache plantée dans le crâne. L’autre, la suit en habit de chevalier, un seau grillagé sur la tête, en guise de heaume. Ils reviennent du carnaval. Le dialogue est vif et révèle bientôt des failles entre les protagonistes. Quand les invités pénètrent dans la pièce, habillés en Batman (Baptiste Legros) et en dame patronnesse (Inès Camesella), le ton est encore au rire. Mais bientôt, des ruptures, des silences, par le malaise créé, ouvrent les brèches du drame qui est prêt à sourdre.

Une pièce sous influence est accompagnée, soutenue par les battements d’une batterie (Nicolas Tritschler). Parallèlement, la représentation rythme sa pulsation sur le jeu des comédiens. Celui de Sophie Lebrun est particulièrement saisissant. La comédienne développe, de façon étonnante, dans le même temps, une complicité revendiquée avec le public et une intériorité riche et fragile. Les dernières scènes face à Martin Legros bouleversent.

Une pièce sous influence, mise en scène par Sophie Lebrun et Martin Legros, déploie une écriture qui ne peut laisser indifférent. Le collectif La Cohue créé un désordre de sentiments profondément théâtral. A voir au 11 Avignon

Les LM de M La Scène : LMMMMM

Une pièce sous influence

11 Avignon

Jusqu’au 21 juillet à 10h

TEXTE Martin Legros

MISE EN SCÈNE Sophie Lebrun et Martin Legros

INTERPRÉTATION Inès Camesella, Sophie Lebrun, Baptiste Legros, Martin Legros, Nicolas Tritschler ( batterie)

ASSISTANAT À LA MISE EN SCÈNE Loreleï Vauclin

CRÉATION SON, MUSIQUE LIVE ET RÉGIE GÉNÉRALE Nicolas Tritschler

CRÉATION SON ET RÉGIE SON Pierre Blin

LUMIÈRE Audrey Quesnel

SCÉNOGRAPHIE ET RÉGIE PLATEAU Antoine Giard

COSTUMES Loona Piquery

PIANO Andjelka Zivkovic

Collectif La Cohue


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