Inventeurs de ce qu’ils appellent le « théâtre d’objets documentaire », Benoît Faivre et Tommy Laszlo dans Vies de papier mènent l’enquête à partir d’un album de photos découvert dans une brocante. Une plongée ludique et passionnante dans une histoire qui nous mène bien plus loin que prévu.
Critique Vies de Papier
Par un hasard heureux
Un dimanche, à Bruxelles, dans une brocante populaire, Tommy Laszlo découvre un objet exceptionnel. Un album de photos, parfaitement conservé, où tout semble avoir été façonné pour rendre hommage à une femme. De sa naissance à son mariage, des images travaillées, des découpages, des dessins, des collages, rendent compte des étapes de sa vie. Par un hasard plus qu’heureux, cet album intime et particulier tombe entre les mains de Tommy Laszlo et de Benoit Faivre, inventeurs de ce qu’ils nomment « le théâtre d’objets documentaire ».
Qui était cette femme ? Vies de papier présente, sous nos yeux, tout le travail de recherche et de documentation réuni pour répondre à cette question. A partir de l’album, de ses photos, détachées avec soin, analysées, questionnées, à partir de cette archive intime, les membres de la Cie La Bande passante partent à la rencontre de cette femme. Le récit de cette enquête est restituée sur scène par un travail extrêmement riche. Par le biais de formes croisées ( cinéma, transformation plastique, augmentation d’objets, montage vidéo et manipulation d’objets, en présence, filmée en direct), le spectateur est au cœur de la réalisation. L’objet réel, animé, théâtralisé, poétisé, est pris dans le présent de la représentation.
De l’autre côté du miroir
C’est une des premières fois que Tommy Laszlo et que Benoit Faivre sont présents physiquement sur scène « avec un texte en bouche ». Ils sont partie prenante de l’histoire racontée. Sur l’écran et sur le plateau. Réalisateurs du documentaire qui se vit et se tourne en direct, manipulateurs des objets qui inscrivent leur réalité dans la performance sensible, ils deviennent acteurs et témoins d’une histoire qui devient la leur.
En partant à la rencontre de Christa, la femme de l’album, les metteurs en scène vont soulever sans le vouloir des pans cachés de leur histoire personnelle. Comme si l’album de photos, découvert par hasard, convoquait leurs propres albums de famille. L’objet les amène à se révéler et à mettre à jour des secrets qui avaient été occultés.
M La Scène avait déjà beaucoup aimé Cockpit cuisine, le docu-fiction de la Cie La Bande passante,Vies de papier est encore une pépite. L’inventivité et la sincérité de la démarche embarquent le spectateur. “Objets inanimés, avez-vous donc une âme qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ?” A la question de Lamartine, nous ne pouvons répondre que par l’affirmative, à l’issue de la représentation.
Festival #OFF19 d’Avignon au 11 Gilagamesh Belleville, à 15h10
Avec Benoît Faivre et Tommy Laszlo
Réalisation Benoît Faivre, Kathleen Fortin, Pauline Jardel et Tommy Laszlo
Direction artistique Benoît Faivre, Tommy Laszlo
Regard extérieur Kathleen Fortin
Prise de vues Pauline Jardel
Création musicale Gabriel Fabing
Création lumière Marie-Jeanne Assayag-Lion
Costumes Daniel Trento
Construction Marie-Jeanne Assayag-Lion, Olivier Gaille, David Gallaire, Thierry Mathieu et Daniel Trento
Régie Marie-Jeanne Assayag-Lion ou Charline Dereims
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