LM M Le Bruit des arbres qui tombent de Nathalie Béasse
La matière sonore de l’imaginaire
Au Théâtre de la Bastille, Le Bruit des arbres qui tombent, la dernière pièce de Nathalie Béasse, propose une réflexion sur l’image, celle qui entre en résonance avec l’imaginaire. La matière, source bruyante et murmurante, est manipulée par quatre acteurs, une femme ( Estelle Delcambre) et trois hommes ( Karim Fatihi, Erik Gerken, Clément Goupille), afin d’en faire naître les échos qui touchent.
Danser le fol espoir des hommes
Sur scène, un quatuor relève le défi de faire exister l’humanité chancelante. C’est par la danse, le rythme, que le chœur fait entend sa voix. Pas frappés, repris jusqu’à l’épuisement, qui portent avec force le souffle tenu d’une volonté de vivre. Glissades ludiques pour redire la gaieté d’être là, ensemble. Duo fragile, en équilibre, épinglé sur le mur ou solidaire, pour parvenir à marcher. La danse parvient à exprimer le fol espoir des hommes qui tentent d’avancer alors que le bruit des arbres qui tombent devrait les pétrifier d’effroi.
La réussite de Nathalie Béasse tient à cet univers visuel qui se nourrit du sonore pour donner à voir joyeusement le tragique. On regrettera juste que la mise en place de la parole et des textes choisis ne parvienne pas à s’intégrer plus aisément. Ce que la matière et la danse imposent spontanément, dans leur absolue évidence, la voix humaine, artificiellement installée, échoue à le poursuivre. Même si l’on comprend la tentation de recréer une communauté qui brise les frontières et fasse entendre les langues d’une humanité d’après Babel qui remonte aux âges les plus anciens et les plus sacrés; la parole, ici, nuit à l’écoute du craquement de l’émotion. Celle que procure les images qui se jouent du silence.