Iphigénie mise en scène Chloé Dabert

L M (Peu)

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Après sa création à Avignon, Chloé Dabert reprend Iphigénie au Théâtre de Gennevilliers mais l’immobilisme cadenasse l’émotion.

« Le vent qui nous flattait nous laissa dans le port »

Tragique sacrifice imposé à un roi, tragique sacrifice imposé à un père. Iphigénie, la pièce de Jean Racine, retrace en cinq actes, un des épisodes mythiques qui frappe la famille maudite des Atrides. Agamemnon doit immoler sa propre fille pour apaiser la colère des dieux et permettre aux Grecs de poursuivre leur route vengeresse vers Troie.  

Chloé Dabert tire la pièce vers la modernité en optant pour un scénographie où le néon domine.  A jardin, deux tubes verticaux se dressent parmi quelques épis de broussailles clairsemées. Dans cette lumière froide et figée, un grand échafaudage s’élève à cour et occupe une grande partie du plateau. La majorité des entrées et sorties se font par un passage sous le premier étage de ce mirador. Parfois, les personnages traversent le grand tissu de camouflage qui enserre les murs autour du plateau.

Nous sommes dans le camp militaire d’Agamemnon. Les Grecs attendent les vents propices, dissimulés aux yeux de l’ennemi, observant de loin les Troyens. Le dispositif est lisible. Mais, l’immobilisme, qu’il souligne ostensiblement, se trouve renforcé par un jeu volontairement statique. On se parle de loin. De profil. Lançant les vers sans accroche charnelle. Il en ressort une impression de redondance froide. Le spectateur aspire, alors, au vent qui viendrait bouleverser cet ordonnancement rigide de son souffle chaud et libérateur.

Iphigénie
Iphigénie ©Victor-Tonelli

Trois femmes puissantes

La pièce est sauvée par ses actrices. Elsa Agnès campe une Iphigénie convaincante qui offre sa généreuse jeunesse au couteau préparé. Louise Chevillotte prête à Ériphile ses accents passionnés qui réveillent les ardeurs de la langue racinienne. Anne-Lise Heimburger irradie de sa présence altière le plateau. Elle est Clytemnestre. La reine. Sa longue tirade à l’acte IV, devant son mari, est un des moments les plus saisissant du spectacle. La véhémence a été écartée pour la dignité. Chaque mot, chaque trait, ciselé, affûté comme un poignard, est lancé avec force et vibre dans le silence de la salle. 

Face à elles, hélas, pas de répondant masculin. Leurs partenaires font pâle figure. Manquant de prestance et de maîtrise, ils sont en deçà des attentes. Ils ne sont pas aidés par les costumes qui ressemblent à des fripes d’armée trouvées aux Puces de Saint-Ouen. La langue est souvent malmenée. Les diérèses oubliées, entre autres, écorchent les oreilles lorsque Achille parle. Il parvient même à faire rire la salle, à un moment, ce qui est pour le coup un « sacrilège » dans une tragédie racinienne.

Iphigénie de Chloé Dabert déçoit. On ne peut enlever à Chloé Dabert la maîtrise du placement des comédiens dans l’espace. Mais, les choix scénographiques et dramaturgiques qui privilégient l’immobilisme n’ont pas conduit à faire naître la tension comme cela avait été peut-être envisagé.

 

T2G Mise en scène Chloé Dabert

EN CO-PROGRAMMATION AVEC LE CENTQUATRE-PARIS

18-22 février 2019

avec
Elsa Agnès, Yann Boudaud, Bénédicte Cerutti, Olivier Dupuy, Sebastien Eveno, Anne-Lise Heimburger, Julien Honoré, Arthur Verret

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