LM MM Le Jeu de l’amour et du Hasard mise en scène Salomé Villiers
Marivaux, la comédie du sentiment
Comédie du travestissement et du sentiment, Le Jeu de l’amour et du Hasard de Marivaux met en scène deux couples, Sylvia et Dorante, des aristocrates, ainsi que Lisette et Arlequin, leurs valets réciproques. A la recherche de la vérité, les maîtres imaginent, chacun de leur côté, de prendre la place de leurs valets afin « d’examiner un peu sans qu’il (le) connût !» leur promis. Le déguisement et la nouvelle identité qu’il crée vont leur permettre à la fois d’expérimenter la liberté hors des conventions et d’avoir l’illusion de se protéger de la violence du sentiment. Mais le stratagème se retourne contre ceux qui pensaient en être les instigateurs. Le hasard et l’amour vont se jouer des personnages.
Une mise en scène savoureuse
La compagnie de La Boite aux lettres au Théâtre Michel monte la pièce avec la volonté d’en souligner les aspects comiques. Chaque acte s’ouvre sur un clip vidéo aux accents pop rock qui invente un ailleurs riant sous forme de saynètes burlesques : cauchemars prénuptiaux de Sylvia rythmés par la musique de Bowie, repas chez Orgon où les maîtres, novices, déguisés en valets massacrent la découpe d’un poulet. La gaieté est de mise dans les costumes, les accessoires. L’esthétique sixties est revendiquée pour casser les codes attendus du XVIIIe. Et ça marche!
La mise en scène de Salomé Villiers, extrêmement inventive, malgré la scène exiguë, est soutenue par des comédiens qui savourent ce qu’on leur donne à jouer. Tous sont excellents ( Étienne Launay, Raphaëlle Lemann, Bertrand Mounier, François Nambot, Philippe Perrusset et Salomé Villiers). Ils font entendre la profondeur des sentiments de façon très généreuse ( mention à Salomé Villiers en Sylvia et Étienne Launay en Arlequin ) et rivalisent de drôlerie.
Le Jeu de l’amour et du hasard ne cesse d’être revisité, preuve de la modernité de Marivaux. Au Théâtre Michel, la pièce menée avec énergie et espièglerie surprend encore.